Le syndicalisme à la française

syndicat

Les syndicats tels qu’on les connaît aujourd’hui en France sont nés au dix-neuvième siècle (autorisés en 1884) même si on peut leur trouver des ancêtres dans les associations professionnelles, sociétés de compagnonnage et autre guildes qui remontent à la nuit des temps.

Dés le début du syndicalisme légal en France, la Fédération nationale des syndicats, principale fédération à l’époque est de fait dirigée par les guesdistes c’est à dire des marxistes. Le relais est pris en 1895 par la CGT qui dés 1906 précise dans la charte d’Amiens son orientation révolutionnaire :« La CGT groupe, en dehors de toute école politique, tous les travailleurs conscients de la lutte à mener pour la disparition du salariat et du patronat ». il faut noter que les principaux syndicats ouvriers (CGT, CFDT, FO) ou étudiants (UNEF) actuels se reconnaissent dans ce texte (avec quelques réserves pour certains).

La suite est connue, la CGT, longtemps seule centrale syndicale ouvrière française significative va se scinder, se réconcilier puis va finir, après guerre, par donner deux des grandes centrales existant encore de nos jours : la CGT bien entendu, et la CGT-FO (nom complet de FO).

Donc ces syndicats sont historiquement proche des mouvements marxistes, le secrétaire général de la CGT va longtemps être membre du comité central du parti communiste et donc inscrire leur action non seulement dans la revendication et la défense des ouvriers face aux méchants patrons mais surtout dans une idéologie basée sur la lutte des classes et le rôle révolutionnaire des syndicats.

À l’opposé dans les pays anglo-saxons les syndicats ont peu été influencés par le marxisme & se sont concentrés sur la défense des salariés en prenant une voie différente. Pas systématiquement, pas partout & tout le temps, mais beaucoup de syndicats en particulier américains travaillent avec le patronat en gérant en partie l’embauche ou la formation. Et le discours devient : « Nous vous garantissons des ouvriers sélectionnés, bien formés, nous assurons la sécurité sur le lieu de travail (pas de mec bourré sur le chantier) en échange vous les payés bien. »

Ce système est loin d’être parfait, des syndicats surpuissants, maîtres de l’embauche, les dérives arrivent vite. Mais par définition ils ne sont pas là pour préparer la révolution. Donc il sont crédibles (sauf quand ils trop de liens avec la mafia mais c’est une autre histoire...).

Pour mémoire nos syndicats français marxisants détestent ce système qui a existé en France pendant des années : le syndicat du livre gérait l’embauche & avaient des liens avec les écoles professionnelles de l’imprimerie & dérivés. Et, histoire de rester logique, était une branche de la CGT ! La même CGT qui défend le système de retraite par répartition & combat tout ce qui ressemble à un système par capitalisation, cogère la PRÉFON, première caisse de retraite par capitalisation en France.

D’où la position de l’Ordre des médecins qui a une vision marxiste des syndicats : nous ne sommes pas un syndicat, nous ne sommes pas là pour défendre les professionnels. Et donc le rôle de l’Ordre (s’il en a un car personnellement je ne l’ai toujours pas compris mis à part me racketter 300 € par an) est défini en négatif par rapport à une vue marxiste des syndicats.

Toute cette introduction pour en arriver à quoi ? Les centrales syndicales se plaignent d’une chute des adhésions. Mais qui va se croire défendu au quotidien par des gens qui ont pour seul but de faire la révolution ? Bien sûr il y a dans nombre d’entreprises des délégués qui font leur travail correctement & donc des adhésions à tel ou tel syndicat pour des raisons strictement locales & c’est très bien ainsi. On voit en parallèle la montée de nouveaux syndicats (SUD ou les syndicats "autonomes" par exemple [1]). qui n’ont pas ce passif.

Résultat les salariés (en dehors de quelques groupes très privilégiés comme les enseignants ou les cheminots) ne sont plus défendus, le gouvernement & le patronat qui le savent très bien, en jouent et les perdants sont toujours les mêmes. Par exemple toute réforme utile du code du travail est bloquée systématiquement au nom des acquis sociaux.

Pour remettre tout ça dans les rails il faut un gouvernement fort, capable d’imposer les réformes utiles & donc un contre pouvoir fort également mais au service des salariés & non de la révolution. Un bon moyen serait, entre autre, qu’il y ait des représentants des syndicats dans la Haute Assemblée au coté des représentants des élus ou des forces vives. Une présence au niveau législatif peut être un des moyens de jouer leur rôle qui est essentiel sans avoir à faire la grève tous les trois jours.

[1Maintenant que les lois protégeant les centrales historiques au nom de leur rôle (discutable) dans la Résistance sont enfin abolies